Syndicat

  • Historique

Voir notre article sur la genèse des syndicats ici
Sur l'histoire du syndicalisme révolutionnaire en France, en Belgique et ailleurs, voir ici.

Au départ, les syndicats sont des caisses de grève clandestines des travailleurs. Elles sont illégales mais perdurent et montrent leur extraordinaire efficacité tout au long du XIXe siècle. Les grèves, soutenue par ces caisses, peuvent durer et gagnent en efficacité: les revendications sont rencontrées. Globalement, les salaires augmentent et le temps d'emploi diminue.

Après la seconde guerre mondiale, en Belgique, la cogestion s'impose. Des organes de gestion paritaires (syndicats-patronat) gèrent les salaires sociaux obtenus par le mouvement social en contre-partie de la paix sociale.


Note sur la paix sociale: la paix sociale consiste en un engagement réciproque entre les travailleurs et les propriétaires des outils de production. D'un côté les travailleurs se sont engagés à la paix sociale alors qu'ils étaient armés, que les grèves générales se multipliaient et qu'ils occupaient les usines à la Libération et que les autorités avaient été désarmées par les circonstances. D'un autre côté, les patrons s'engageaient à préserver les salaires de l'inflation, à garantir le plein emploi et à socialiser une partie salaire par la sécurité sociale. Si les employés ont respecté jusqu'à présent leurs engagements, force est de constater que les patrons ont trahi leur parole et déclaré la guerre aux travailleurs en diminuant les salaires, en diminuant les cotisations sociales (et les prestations) et en créant le chômage de masse. Logiquement, les travailleurs ne sont plus tenus par les engagements pris à la Libération puisque la partie adverse a de facto dénoncé les siens.
Les syndicats sont alors devenus des institutions légales, tout à fait officielles, impliquées dans la gestion d'une partie du salaire au nom de celles et ceux qu'ils représentent, les producteurs.

Note sur la cogestion: la cogestion du salaire social est un scandale social. Les salaires socialisés, la sécurité sociale, ont été consentis à la place d'une augmentation de salaire à la Libération. Les salaires sociaux dans tous les pays Bismarkiens (France, Pays-Bas, Allemagne, Belgique) sont donc une partie intégrante des salaires. On ne voit pas quelles obscures motivations idéologiques ont amené à accepter que les patrons et le gouvernement soient impliqués dans ce qui appartient en droit (et en comptabilité) aux producteurs (employés, ouvriers, chômeurs, invalides et retraités).
Par ailleurs, comme les salaires sociaux sont réalisés par celles et ceux qui les touchent (voir ici), on ne voit pas bien pourquoi ils ne gèrent pas collectivement - sans que des tiers puissent se mêler de leurs affaires, de la même manière que les ouvriers gèrent seuls leur paie individuelle, sans que patrons ou gouvernants ne s'en mêlent.
Depuis, les intérêts financiers des syndicats les poussent, en tant qu'institutions, à diminuer leurs frais, à diminuer le nombre de jours de grève. Il y a un hiatus entre les intérêts objectifs des syndicats-institutions (diminuer leurs frais) et les intérêts de celles et ceux qu'ils représentent (obtenir, sauvegarder des droits sociaux). Ces contradictions peuvent être résolues par un soutien commun aux salaires (ils nourrissent la puissance financière des syndicats) et contre l'emploi (il sape les bases du droit social).

Par contre, les intérêts institutionnels mal compris des syndicats peuvent pousser leurs têtes à des tenir des discours de résignation, des discours fatalistes, ils peuvent pousser les syndicats à casser les mouvements de la base. On se méfiera des arguments 'raisonnables' des réformateurs destinés à casser les demandes, les exigences des producteurs, à casser le rapport de force en notre faveur.

Les syndicats briseurs de grève, les syndicats jaunes (ou les franges jaunes des syndicats d'une autre couleur) se reconnaissent aisément:

- ils renvoient la colère des producteurs sur des luttes secondaires, sans importance stratégique

- ils dénoncent énormément mais ne font pas valoir leur rapport de force effectif (que l'on songe au 3,2 millions de syndiqués de la CSC et de la FGTB en Belgique, un pays de 11 millions d'habitants)

- ils ne revendiquent pas la diminution (ou l'abolition) de l'emploi mais, au contraire, en promeuvent la détestable pratique,

- au nom de cet emploi qu'ils entendent défendre, ils pratiquent le 'concession bargaining', euphémisme qui désigne l'acceptation de la dégradation des conditions de travail et du salaire au nom de l'emploi

- ils ne se battent pas pour les salaires sociaux, pour les cotisations sociales, pour les préserver et les augmenter en proportion, ils ne font pas le lien entre le statut de salarié sous emploi et salarié hors emploi, ils ne voient pas que les salaires sociaux soutiennent les salaires individuels et ne sont pas un prélèvement sur ces derniers

- ils s'acoquinent avec le monde politique réformateur dans un bal incestueux entre conjoints, entre monde politique et syndical

- ils entérinent la scandaleuse cogestion de nos salaires au lieu de réclamer nos droit légitimes à en disposer seuls comme producteurs

- ils ne défendent pas les salaires les plus faibles, se montrent complices d'une direction esclavagiste, ils se montrent corruptibles

- dans leur représentation du monde, ils ont déjà perdu, ce qui les met, stratégiquement, dans un camp ennemi de la victoire

- ils ne voient pas la différence entre les cotisations sociales, des salaires à l'avantage des producteurs dans la distribution, et les impôts qui grèvent les mêmes salaires et dédouanent les propriétaires de toute responsabilité dans la misère ambiante

- ils font valoir la charité (pour les syndicats chrétiens) ou la solidarité (pour les syndicats socialistes) au lieu d'obtenir justice, au lieu de faire valoir le droit contre l'esclavagisme de l'emploi et de l'avidité

  • Représentativité des syndicats

L'absence de représentation des malades, des invalides ou des retraités pose un sérieux problème démocratique. Ces producteurs hors emploi ne sont pas représentés lorsqu'il s'agit de prendre des décisions les concernant, concernant les salaires qu'ils réalisent.

La sécurité sociale, par exemple, est gérée 'paritairement' en Belgique ou en France. Les partenaires sociaux représentés sont l'État, les organisations patronales réactionnaires (les patrons qui veulent entreprendre sans passer leur temps à faire du bénéfice ou à entretenir de malsaines relations de subordination ne sont pas représentés) et les syndicats.

Comme les syndicats organisent leur représentation dans des élections professionnelles dans les entreprises, seuls les travailleurs en contrat stable dans de grandes entreprises sont représentés par les syndicats qui adoptent une ligne politique ajustée sur les seuls intérêts de cette catégorie de producteurs, font l'impasse sur les retraités, les malades, les chômeurs et les précaires.

Et encore, les représentants mandataires dans les diverses instances doivent obéir au syndicat-employeur et non aux mandants-travailleurs. Ce sont les syndicats sous leur forme juridique d'employeur qui signent les chèques, qui paient les salaires des mandataires. Les employés-représentant représentent donc par la force des choses leur syndicat-employeur et non leurs camarades employés.

La chose devient cruciale quand le gouvernement entend réduire le salaire social, la cotisation, au nom de la 'compétitivité', de l'emploi ou d'autres fadaises du même tonneau. Les employés en CDI, en bonne santé, dans de grosses boîtes, peuvent accepter des concessions sur ce qu'ils ne perçoivent pas (à tort) comme leur intérêt vital. Du coup, les syndicats peuvent signer ce genre d'accord sans se prendre de déculottée aux élections sociales suivantes. La retraite constitue une exception intéressante: comme elle concerne aussi bien les producteurs représentés par les syndicats, ces derniers se montrent beaucoup plus fermes et ... font parfois reculer les réformes les plus réactionnaires. Par contre, pour les allocations de chômage, les choses se passent tout à fait différemment: les syndicats ne sont pas poussés par leur base électorale à être fermes, du coup, ils ne le sont pas et les réformes en matière de chômage passent beaucoup plus rapidement.

Inutile de préciser que nous sommes favorables à une représentation proportionnelle de tous les producteurs dans les syndicats. Des secteurs comme le textile seraient majoritairement constitués de producteurs sans emploi, ce qui les rendraient certainement moins conciliants envers tous les plans d'activation (lire, de harcèlement) ou d'accompagnement (vers la misère) qu'ils signent gentiment aujourd'hui, sans faire de vagues.

Tous les producteurs doivent être représentés ensemble car leurs intérêts sont les mêmes. J'en veux pour preuve qu'un chômage moins 'généreux' pousse les salaires poche vers le bas et qu'une situation de plein emploi avec de bons salaires pousse vers le haut les allocations de chômage.

Nous appelons tous les syndiqués à se battre sur le point de la représentation de tous les producteurs; nous interpellons les syndicats pour qu'ils réorganisent les élections sociales de telle sorte que cette représentation soit effective.

Au moins, qu'un syndicat jaune, qui trahisse un partie des producteurs (hors emploi) se prenne un veste aux élections. C'est le strict minimum.


  • Démocratie sociale


En Belgique, les mandats des travailleurs sont la propriété des syndicats et non des travailleurs. C'est dire que les syndicats exercent un pouvoir sur les délégués pourtant démocratiquement élus. La structure syndicale est constituée d'employés soumis à un employeur (les secrétaires fédéraux ou régionaux), à toute une hiérarchie qui n'est justifiable devant personne.


Il y a un enjeu démocratique interne aux syndicats. Il faut rendre le pouvoir aux électeurs et aux élus, ce sont les délégués qui doivent contrôler les dirigeants et non l'inverse. Quant aux permanents, ce sont des producteurs. Ils doivent pouvoir travailler, idéalement, en toute indépendance de leur employeur (les dirigeants) conformément au droit du travail et ne doivent avoir strictement aucun rôle de contrôle, d'appréciation ou de censure par rapport aux délégués élus.


C'est en se fondant sur ces principes qu'un syndicat existant ou qu'un syndicat à créer pourra éventuellement fonctionner selon les intérêts de ses mandants et non selon les intérêts de ses mandataires.